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Les petits métiers
Il me revient en mémoire quelques petits métiers disparus. En voici
quelques uns : le Caïfa, le rétameur, la marchande de harengs, le
châtreux, le marchand de peaux de lapin.
Joseph venait de Saint-Sauveur avec son triporteur à pédales. Il
vendait du café, marque Caïfa naturellement, des pâtes, des
conserves... le tout en petite quantité. Quel métier de galère de
parcourir quinze à vingt kilomètres avec un tel chargement sur les
routes accidentées et non goudronnées des environs du chef‑lieu!
Il est vrai qu'il avait Rampan, un gros chien roux au poil ras qui
lui tenait compagnie et l'aidait à monter les côtes avec son collier
d'attelage!
Le rétameur, lui, passait deux fois par an. Petit retour en arrière:
l'alu et l'inox étaient inconnus, seules étaient utilisées les
casseroles en fer étamé, parfois un chaudron en cuivre. Les
fourchettes étaient en fer et les cuillères en étain, inutile de
dire qu'elles se tordaient facilement, il fallait donc les
remplacer. Le rétameur installé sur la place de l'église récupérait
les morceaux gardés précieusement et les faisait fondre. Liquéfié,
l'étain était versé dans des moules et chacun récupérait des
cuillères neuves. C'est également dans cet étain liquide qu'il
trempait les casseroles qui ressortaient brillantes.
Fine était marchande de harengs. Chaque semaine elle recevait
plusieurs caisses de harengs en gare de Saint-Sauveur et chaque
jeudi, d'octobre à avril on la voyait arriver bien emmitouflée dans
un grand capuchon noir, avec aux pieds de gros brodequins et sur la
tête un bonnet noir qui lui cachait les oreilles. Elle poussait une
sorte d'étal monté sur deux roues de bicyclette que son bricolier de
mari lui avait fabriqué. Ainsi de hameau en hameau, de maison en
maison elle offrait ses harengs frais et quelques saurs.
Le châtreux : en Poyaude souvent il fallait deux chevaux pour
labourer et faire les charrois. Quand je dis deux chevaux c'était
souvent une jument et un cheval hongre. Les jeunes poulains étaient
alors castrés, non pas par le vétérinaire qui demandait un prix fou,
mais par le châtreux de Leugny qui vous faisait çà en deux coups de
cuillère à pot pour quelques pièces mais souvent assorties d'un gros
lapin ou d'un poulet.
Le marchand de peaux de lapin : chaque famille élevait pour sa
consommation de nombreux lapins; ces bêtes étaient tuées et
dépouillées à la ferme. Les peaux étaient tendues sur des fourchines
ou bourrées de paille, puis mises à sécher sous le hangar attendant
le passage du marchand.
Tous les deux ou trois mois, Ladent, le marchand de peaux de lapin
passait avec son vélo à deux porte‑bagages et muni d'un petit
grelot. L'homme, d'une cinquantaine d'années, avait une belle
moustache à la gauloise et un bagout de première catégorie. Il
portait été comme hiver un vaste paletot de chasse, une casquette
enfoncée jusqu'aux oreilles et une sorte de sacoche attachée à sa
ceinture où se trouvaient pêle-mêle pièces et billets.
Avec lui arrivait une forte odeur de suint, de sauvagine et de
vieille graisse dont l'individu était imprégné et que Mirette la
chienne avait détectée bien avant son arrivée dans la cour !
Une peau de lapin représentait une valeur de 10 à 15 sous selon
l'épaisseur, la grandeur, la couleur. Les blanches étaient les plus
chères. Après une longue discussion les peaux étaient ficelées sur
un des porte‑bagages et payées. Alors notre bonhomme buvait un coup
de cidre ou de marc, racontait les derniers potins du village et
reprenait sa route en criant: Peaux de lapins! Peaux!
Vocabulaire :
Bricolier : bricoleur
En deux coups de cuillères à pots : très rapidement
Fourchines : petites fourches
Gilbert PIMOULLE PARFUMS D' ENFANCE En Puisaye, autour de 1920 - édité en 1999
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